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Numéro 84 de la lettre d’information Digital Watch – novembre 2023

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Cover of the November 2023 newsletter in French, with the Illustration of the tree, representing an Artificial Intelligence, in a pot, being watered and its branches being shaped by one woman and two men.

Observatoire

Coup d’œil : ce qui fait des remous dans le domaine de la politique numérique

Géopolitique

Le Bureau de l’industrie et de la sécurité (BIS) du ministère américain du Commerce (DoC) a annoncé un renforcement des restrictions à l’exportation de semi-conducteurs avancés vers la Chine et d’autres pays soumis à des embargos sur les armes. Cette décision a suscité une vive réaction de la part de la Chine, qui a qualifié ces mesures d’intimidation unilatérale et d’abus des mécanismes de contrôle des exportations.

Pour ne rien arranger au paysage technologique sino-américain, le Gouvernement américain envisage d’imposer des restrictions à l’accès des entreprises chinoises aux services d’informatique dématérialisée (cloud). Si cette mesure est mise en œuvre, elle pourrait avoir des conséquences importantes pour les deux pays, en particulier pour des acteurs majeurs comme Amazon Web Services et Microsoft. Enfin, pour des raisons de sécurité, le Canada a interdit les logiciels chinois et russes sur les appareils fournis par le Gouvernement.

Gouvernance de l’IA

Par ailleurs, un projet de loi ayant fait l’objet d’une fuite suggère que les pays d’Asie du Sud-Est, sous l’égide de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), adoptent une approche favorable aux entreprises en ce qui concerne la réglementation de l’IA. Le projet de guide sur l’éthique et la gouvernance de l’IA demande aux entreprises de tenir compte des différences culturelles et ne prescrit pas de catégories de risques inacceptables. De son côté, l‘Allemagne a mis en place un plan d’action sur l’IA visant à accroître sa progression à l’échelle nationale et européenne, afin de concurrencer les forces prédominantes des États-Unis et de la Chine dans le domaine de l’IA.

Sécurité

Les responsables des agences de sécurité des États-Unis, du Royaume-Uni, de l’Australie, du Canada et de la Nouvelle-Zélande, collectivement connus sous le nom de « Five Eyes », ont publiquement mis en garde contre la vaste campagne d’espionnage menée par la Chine pour obtenir des secrets commerciaux. La Commission européenne a annoncé un examen complet des risques de sécurité dans des domaines technologiques essentiels, notamment les semi-conducteurs, l’IA, les technologies quantiques et les biotechnologies. Le 8 novembre, ChatGPT a été confronté à des pannes, qui seraient dues à une attaque par déni de service distribué (DDoS). Le groupe de pirates informatiques Anonymous Sudan en a revendiqué la responsabilité. Enfin, le dernier rapport de Microsoft sur la défense numérique a révélé une augmentation globale des cyberattaques, avec une hausse des opérations d’espionnage et du trafic d’influence parrainés par les gouvernements.

Infrastructure

La Commission fédérale des communications (FCC) des États-Unis a voté en faveur du rétablissement des règles relatives à la neutralité de l’Internet. Initialement adoptées en 2015, ces règles ont été abrogées par l’Administration précédente, mais sont maintenant sur le point d’être rétablies. 

Access Now, l’Internet Society et 22 autres organisations et experts ont conjointement envoyé une lettre à l’Autorité de régulation des télécommunications de l’Inde (TRAI) pour s’opposer à l’application de coûts de réseau discriminatoires ou de régimes de licence pour les plateformes en ligne.

Économie de l’Internet

La société Google, propriété d’Alphabet, aurait versé une somme substantielle de 26,3 milliards de dollars à d’autres entreprises en 2021 pour s’assurer que son moteur de recherche reste l’option par défaut sur les navigateurs Internet et les téléphones portables. Cette information a été révélée lors du procès anticoncurrentiel intenté par le ministère américain de la Justice (DoJ). Pour des actions anticoncurrentielles similaires, la Japan Fair Trade Commission (JFTC) a ouvert une enquête anti-monopole sur la position dominante de Google dans le domaine de la recherche sur le web. 

La Banque centrale européenne (BCE) a décidé d’entamer une phase de préparation de deux ans à compter du 1er novembre 2023 afin de finaliser les réglementations et de sélectionner les partenaires du secteur privé avant le lancement éventuel d’une version numérique de l’euro. L’étape suivante sera la mise en œuvre éventuelle, après le feu vert des décideurs politiques. Parallèlement, le Conseil européen de la protection des données (CEPD) a demandé que la législation sur l’euro numérique proposée par la Commission européenne renforce les garanties en matière de protection de la vie privée.

Droits numériques

La présidence du Conseil et le Parlement européen sont parvenus à un accord provisoire sur un nouveau cadre pour l’identité numérique européenne (eID) afin de fournir à tous les Européens une identité numérique fiable et sécurisée. Dans le cadre de ce nouvel accord, les États membres fourniront aux citoyens et aux entreprises des portefeuilles numériques qui relient leur identité numérique nationale à d’autres attributs personnels, tels que les permis de conduire et les diplômes.

La Commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs du Parlement européen a publié un rapport mettant en garde contre la nature addictive de certains services numériques et préconisant une réglementation plus stricte pour lutter contre la conception addictive des plateformes numériques. Dans le même ordre d’idées, le Comité européen de la protection des données a ordonné au régulateur irlandais des données d’imposer une interdiction permanente de la publicité comportementale de Meta sur Facebook et Instagram.

Les principaux groupes politiques du Parlement européen sont parvenus à un consensus sur un projet de législation obligeant les plateformes Internet à détecter et à signaler les contenus pédopornographiques afin d’empêcher leur diffusion sur Internet.

Politique de contenu

Meta, la société mère de Facebook et d’Instagram, est confrontée à une bataille juridique lancée par plus de 30 États américains. Les plaignants affirment que Meta a intentionnellement et sciemment utilisé des fonctionnalités addictives tout en dissimulant les risques potentiels liés à l’utilisation des médias sociaux, violant ainsi les lois sur la protection des consommateurs et la réglementation sur la protection de la vie privée des enfants de moins de 13 ans.

L’UE a officiellement demandé à Meta et TikTok des précisions sur les mesures de lutte contre la désinformation. Dans le contexte du conflit au Moyen-Orient, l’UE souligne les risques liés à la diffusion à grande échelle de contenus illégaux et de désinformation.

La loi britannique sur la sécurité en ligne (Online Safety Act), qui impose de nouvelles responsabilités aux entreprises de médias sociaux, est entrée en vigueur. Cette loi vise à renforcer la sécurité en ligne et rend les plateformes de médias sociaux responsables de leurs pratiques de modération des contenus.

Développement

La bande de Gaza a subi trois coupures d’Internet depuis le début du conflit, ce qui a incité la société SpaceX d’Elon Musk, Starlink, à offrir un accès à Internet aux organisations d’aide internationalement reconnues à Gaza. Par ailleurs, les ONG environnementales exhortent l’UE à prendre des mesures pour lutter contre les déchets électroniques, en demandant une révision de la directive sur les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE), selon la communication du Bureau européen de l’environnement.

LES CONVERSATIONS DE LA VILLE – GENÈVE

Comme convenu lors de la session ordinaire du Conseil de l’UIT en juillet 2023, une session supplémentaire consacrée à la confirmation des questions logistiques et à la planification organisationnelle pour 2024-2026 s’est tenue en octobre 2023. Elle a été précédée par le groupe de réunions des groupes de travail du Conseil (GTC) et des groupes d’experts (GE), au cours desquelles la liste des présidents et des vice-présidents a été établie jusqu’à la Conférence de plénipotentiaires de 2026. Le prochain groupe de réunions des GTC et des GE aura lieu du 24 janvier au 2 février 2024.

Le troisième sommet du Geneva Science and Diplomacy Anticipator (GESDA) a vu le lancement de l’Open Quantum Institute (OQI), un partenariat entre le Département fédéral suisse des affaires étrangères (DFAE), le CERN et UBS. L’OQI vise à rendre les ordinateurs quantiques de haute performance accessibles à tous les utilisateurs qui se consacrent à la recherche de solutions et à l’accélération des progrès dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD). L’OQI sera hébergé au CERN à partir de mars 2024 et facilitera l’exploration des cas d’utilisation de la technologie dans les domaines de la santé, de l’énergie, de la protection du climat, etc.

En bref

Définir le paysage mondial de l’IA

Nous avons passé la majeure partie de l’année 2023 à lire et à écrire, chaque mois, sur la gouvernance de l’IA. Le mois d’octobre ne fait pas exception. Alors que le monde est aux prises avec les complexités de cette technologie, les initiatives suivantes illustrent les efforts déployés pour relever les défis en matière d’éthique, de sécurité et de réglementation, tant au niveau national qu’international.

Décret de M. Biden sur l’IA. Le décret représente à ce jour l’effort le plus important du gouvernement américain pour réglementer l’IA. Dévoilé par anticipation, il fournit des directives applicables dans la mesure du possible et appelle à une législation bilatérale lorsque cela s’avère nécessaire, notamment en matière de confidentialité des données.

L’accent mis sur la sûreté et la sécurité de l’IA en est l’une des caractéristiques les plus marquantes. Les développeurs des systèmes d’IA les plus puissants sont désormais tenus de partager les résultats des tests de sécurité et les informations critiques avec le gouvernement américain. En outre, les systèmes d’IA utilisés dans les infrastructures critiques sont soumis à des normes de sécurité rigoureuses, ce qui témoigne d’une approche proactive visant à atténuer les risques potentiels associés au déploiement de l’IA.

Contrairement à certaines lois émergentes sur l’IA, comme la loi sur l’IA de l’UE, le décret de M. Biden adopte une approche sectorielle. Il demande à des agences fédérales spécifiques de se concentrer sur les applications de l’IA dans leur domaine. Par exemple, le ministère de la Santé et des Services sociaux est chargé de promouvoir une utilisation responsable de l’IA dans le domaine de la santé, tandis que le ministère de la Culture est chargé d’élaborer des lignes directrices pour l’authentification des contenus et le marquage en filigrane afin d’étiqueter clairement les contenus générés par l’IA. Le DoJ est chargé de s’attaquer à la discrimination algorithmique, ce qui témoigne d’une approche nuancée et adaptée de la gouvernance de l’IA.

Au-delà de la réglementation, le décret vise à renforcer l’avance technologique des États-Unis. Il facilite l’entrée des travailleurs hautement qualifiés dans le pays, reconnaissant leur rôle essentiel dans l’avancement des capacités d’IA. Le décret donne également la priorité à la recherche sur l’IA par le biais d’initiatives de financement, d’un accès accru aux ressources et aux données relatives à l’IA, et de la mise en place de nouvelles structures de recherche.

Les principes directeurs du G7. Simultanément, les pays du G7 ont publié leurs principes directeurs pour l’IA avancée, accompagnés d’un code de conduite détaillé pour les organisations qui la développent.

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Source de la photo : Politico

Ces principes, 11 au total, s’articulent autour de la responsabilité fondée sur le risque. Le G7 encourage les développeurs à mettre en œuvre des mécanismes fiables d’authentification des contenus, ce qui témoigne d’un engagement à garantir la transparence des contenus générés par l’IA.

Une similitude notable avec la loi européenne sur l’IA est l’approche fondée sur le risque, qui confère aux développeurs d’IA la responsabilité d’évaluer et de gérer les risques associés à leurs systèmes. L’UE s’est rapidement félicitée de ces principes, estimant qu’ils pouvaient compléter les règles juridiquement contraignantes de la loi sur l’IA de l’UE au niveau international.

Tout en s’appuyant sur les principes de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en matière d’IA, les principes du G7 vont plus loin à certains égards. Ils encouragent les développeurs à déployer des mécanismes fiables d’authentification et de provenance du contenu, tels que le filigrane, pour permettre aux utilisateurs d’identifier le contenu généré par l’IA. Toutefois, l’approche du G7 préserve un certain degré de flexibilité, permettant aux juridictions d’adopter le code d’une manière qui s’aligne sur leurs approches individuelles.

Les différents points de vue sur la réglementation de l’IA parmi les pays du G7 sont reconnus, allant d’une application stricte à des lignes directrices plus favorables à l’innovation. Toutefois, certaines dispositions, telles que celles relatives à la vie privée et aux droits d’auteur, sont critiquées pour leur imprécision, ce qui soulève des questions quant à leur capacité à susciter des changements significatifs.

L’initiative chinoise de gouvernance mondiale de l’IA (GAIGI). La Chine a dévoilé son GAIGI lors du troisième forum « Belt and Road », marquant ainsi une étape importante dans l’élaboration de la trajectoire de l’IA à l’échelle mondiale. Le GAIGI de la Chine devrait réunir 155 pays participant à l’initiative du « Belt and Road », créant ainsi l’un des plus grands forums mondiaux de gouvernance de l’IA.

Cette initiative stratégique se concentre sur cinq aspects, dont l’alignement du développement de l’IA sur le progrès humain, la promotion des avantages mutuels et l’opposition aux divisions idéologiques. Elle établit également un système de test et d’évaluation pour évaluer et atténuer les risques liés à l’IA, similaire à l’approche basée sur les risques de la future loi sur l’IA de l’UE. En outre, le GAIGI soutient les cadres fondés sur le consensus et apporte un soutien essentiel aux pays en développement dans le renforcement de leurs capacités en matière d’IA.

L’approche proactive de la Chine en matière de réglementation de son industrie de l’IA lui confère un avantage de premier plan. Malgré son approche profondément idéologique, les mesures provisoires de la Chine sur l’IA générative, en vigueur depuis le mois d’août 2023, ont constitué une première mondiale. Cet avantage positionne la Chine comme un acteur influent dans l’élaboration des normes mondiales en matière de réglementation de l’IA.

Sommet sur la sécurité de l’IA à Bletchley Park. Le sommet très attendu du Royaume-Uni a débouché sur un engagement historique de la part des principaux pays et entreprises du secteur de l’IA : celui de tester les modèles d’IA les plus novateurs avant de les rendre publics.

La déclaration de Bletchley identifie les dangers de l’IA actuelle, notamment les préjugés, les menaces pour la vie privée et la production de contenus trompeurs. Tout en abordant ces préoccupations immédiates, l’accent a été mis sur l’IA d’avant-garde – les modèles avancés qui dépassent les capacités actuelles – et son grave potentiel de nuisance. Les signataires sont l’Allemagne, l’Australie, le Canada, la Chine, la Corée, les États-Unis, la France, l’Inde, le Royaume-Uni et Singapour, soit un total de 28 pays plus l’UE.

Les gouvernements vont désormais jouer un rôle plus actif dans l’expérimentation des modèles d’IA. L’AI Safety Institute, un nouveau centre mondial établi au Royaume-Uni, collaborera avec des institutions d’IA de premier plan pour évaluer la sécurité des technologies d’IA émergentes avant et après leur diffusion publique. Il s’agit là d’un changement important par rapport au modèle traditionnel, dans lequel les entreprises d’IA étaient seules responsables de la sécurité de leurs modèles.

Le sommet a débouché sur un accord visant à créer un groupe consultatif international sur les risques liés à l’IA, inspiré du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Chaque pays signataire désignera un représentant qui soutiendra un groupe plus large d’éminents universitaires spécialisés dans l’IA, en produisant des rapports sur l’état de la science. Cette approche collaborative vise à favoriser un consensus international sur les risques liés à l’IA.

Organe consultatif de haut niveau des Nations unies sur l’IA. Les Nations unies ont adopté une approche unique en créant un organe consultatif de haut niveau sur l’IA, composé de 39 membres. Dirigé par Amandeep Singh Gill, envoyé des Nations unies pour la technologie, l’organe publiera ses premières recommandations d’ici la fin de l’année, les recommandations finales étant attendues pour l’année prochaine. Ces recommandations seront examinées lors du Sommet de l’avenir des Nations unies, en septembre 2024.

Au lieu des initiatives précédentes qui ont introduit de nouveaux principes, l’organe consultatif de l’ONU se concentre sur l’évaluation des initiatives de gouvernance existantes dans le monde, l’identification des lacunes et la proposition de solutions. L’envoyé technologique envisage l’ONU comme une plateforme permettant aux gouvernements de discuter et d’affiner les cadres de gouvernance de l’IA.

Définition actualisée de l’IA de l’OCDE. L’OCDE a officiellement révisé sa définition de l’IA : un système d’IA est un système basé sur une machine qui, pour des objectifs explicites ou implicites, déduit, à partir des données qu’il reçoit, comment générer des résultats tels que des prédictions, du contenu, des recommandations ou des décisions qui peuvent influencer des environnements physiques ou virtuels. Les différents systèmes d’IA varient dans leurs niveaux d’autonomie et d’adaptabilité après le déploiement. Il est prévu que cette définition soit incorporée dans le prochain règlement de l’UE sur l’IA.

La désinformation menace de masquer la vérité au Moyen-Orient

La citation « On dit qu’un mensonge peut faire le tour de la terre le temps que la vérité mette ses chaussures », attribuée à Mark Twain, est – ironiquement – apocryphe.

La désinformation est aussi vieille que l’humanité et date de plusieurs décennies sous sa forme actuelle connue, mais les médias sociaux ont amplifié sa vitesse et son étendue. Un rapport du MIT datant de 2018 a révélé que les mensonges se propagent six fois plus vite que la vérité, sur Twitter en l’occurrence. Les différentes plateformes accentuent de manière différente la désinformation, en fonction du nombre de dispositifs mis en place pour assurer la viralité des messages.

Pourtant, toutes les plateformes de médias sociaux ont été confrontées à la désinformation ces derniers jours, alors que les populations étaient en proie à la violence en Israël et à Gaza. Les plateformes de médias sociaux ont été inondées d’images et de vidéos explicites du conflit, ainsi que d’images et de vidéos qui n’avaient rien à voir avec lui.
Que se passe-t-il ? Des images erronées, des documents modifiés et d’anciennes vidéos sorties de leur contexte circulent en ligne. Il est donc difficile pour quiconque cherche des informations sur le conflit de faire la part des choses entre le faux et le vrai.

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Modeler les perceptions. Les affirmations trompeuses ne se limitent pas à la zone de conflit ; elles ont également un impact sur les perceptions globales et contribuent à la division des opinions. Les individus, influencés par des préjugés et des émotions, prennent parti sur la base d’informations qui manquent souvent de précision ou de contexte.

De faux récits sur des plateformes comme X (anciennement connu sous le nom de Twitter) peuvent avoir une incidence sur les programmes politiques, avec des exemples de mémos mensongers circulant au sujet de l’aide militaire et des allégations de transferts de fonds. Même les comptes vérifiés supposés fiables contribuent de manière significative à la diffusion de fausses informations.

Ce que font les entreprises technologiques. Meta a mis en place un centre d’opérations spéciales composé d’experts, dont des personnes parlant couramment l’hébreu et l’arabe. Elle collabore avec des vérificateurs de faits, dont elle utilise les évaluations pour déclasser les faux contenus dans le flux afin d’en réduire la visibilité. Les mesures prises par TikTok sont quelque peu similaires. L’entreprise a mis en place un centre de commandement pour son équipe de sécurité, ajouté des modérateurs maîtrisant l’arabe et l’hébreu, et amélioré les systèmes de détection automatisés. X a supprimé des centaines de comptes liés au Hamas et supprimé ou signalé des milliers de contenus. Google et Apple auraient désactivé les données de trafic en direct pour les cartes en ligne d’Israël et de Gaza. La plateforme de messagerie sociale Telegram a bloqué les chaînes du Hamas sur Android en raison de violations des directives de la boutique d’applications de Google.

L’UE réagit. L’UE a ordonné à X, Alphabet, Meta et TikTok de supprimer les faux contenus. Le commissaire européen Thierry Breton leur a rappelé leurs obligations au titre de la nouvelle loi sur les services numériques (Digital Services Act, DSA), et a donné à X, Meta et TikTok 24 heures pour répondre. X a confirmé avoir supprimé des comptes liés au Hamas, mais l’UE a envoyé une demande formelle d’informations, marquant le début d’une enquête sur le respect de la loi sur les services numériques.

La situation se complique. Cependant, au début de l’année, Meta, Amazon, Alphabet et Twitter ont licencié de nombreux membres de leurs équipes chargées de la désinformation. Cette mesure s’inscrivait dans le cadre d’une restructuration post-COVID-19 visant à améliorer leur rendement sur le plan financier.

Cette situation souligne la nécessité de prendre des mesures énergiques, notamment une vérification efficace des faits, une surveillance réglementaire et une responsabilisation des plateformes, afin d’atténuer l’impact de la désinformation sur la perception du public et le discours mondial.

FGI 2023

Le Forum sur la gouvernance de l’Internet (FGI) 2023 a abordé des questions essentielles dans un contexte de tensions mondiales, notamment le conflit au Moyen-Orient. Avec un nombre record de 300 sessions, 15 jours de contenus vidéo et 1 240 intervenants, les débats ont porté sur des sujets allant du Pacte mondial pour le numérique (PMN) et de la politique en matière d’IA à la gouvernance des données et à la réduction de la fracture numérique.

Les dix questions suivantes sont extraites des rapports détaillés de centaines de séances et d’ateliers organisés dans le cadre du FGI 2023.uEeep0lgHT2UROIVBLtFvKbKddA37jdDlGWmD4Bfi34eKvMDabyFEXKa9PbjUK6bTu uX0IcbvOnAfT16F2lTB2SWgYiS4tmf1o Dt2fPfjhqVjqslqq2nZdfwd3kW9LuOlLKsDNTQg p0VtOUgWAA

1. Comment gouverner l’IA ? Les sessions ont exploré les solutions nationales et internationales en matière de gouvernance de l’IA, en mettant l’accent sur la transparence et en remettant en question la réglementation des applications ou des capacités de l’IA.

2. Quel sera l’avenir du FGI dans le contexte du Pacte mondial pour le numérique (PMN) et du processus d’examen du SMSI+20 ? L’avenir du FGI est étroitement lié à la PMN et au processus d’examen du SMSI+20. L’examen de 2025 pourrait décider du sort du FGI, et les négociations sur la PMN, attendues en 2024, auront également un impact sur la trajectoire du FGI.

3. Comment pouvons-nous utiliser la richesse des données de l’IGF pour un avenir soutenu par l’IA et centré sur l’humain ?

Les 18 années de données du FGI sont considérées comme un bien public. Les discussions ont porté sur l’utilisation de l’IA pour obtenir des informations, améliorer la participation des parties prenantes et représenter visuellement les discussions à l’aide de graphiques de connaissances.

4. Comment atténuer les risques de fracture de l’Internet ? Des approches multidimensionnelles et un dialogue inclusif ont été proposés pour prévenir les conséquences imprévues.

5. Quels sont les enjeux des consultations sur le traité de l’ONU sur la cybercriminalité ? Des inquiétudes ont été exprimées quant au champ d’application, aux garanties en matière de droits de l’Homme, aux imprécisions dans les définitions de la cybercriminalité et au rôle du secteur privé dans les négociations du traité des Nations unies sur la cybercriminalité. L’accent a été mis sur la clarté, sur la séparation entre les crimes cyberdépendants et ceux qui sont rendus possibles par la cybercriminalité, ainsi que sur la coopération internationale.

6. Les nouvelles règles fiscales mondiales seront-elles aussi efficaces que nous l’espérons tous ? Le FGI a débattu de l’efficacité potentielle de la solution à deux piliers de l’OCDE/G20 pour les règles fiscales mondiales. Des inquiétudes subsistent quant aux transferts de bénéfices, aux paradis fiscaux et aux déséquilibres de pouvoir entre les pays du Nord et du Sud.

7. Comment aborder la question de la désinformation et de la protection des communications numériques en temps de guerre ? Les efforts de collaboration entre les organisations humanitaires, les entreprises technologiques et les organismes internationaux ont été jugés essentiels.

8. Comment renforcer la gouvernance des données ? La conférence a souligné l’importance d’une gouvernance des données organisée et transparente, comprenant des normes claires, un environnement favorable et des partenariats public-privé. Le concept Data Free Flow with Trust (DFFT), introduit par le Japon, a été discuté en tant que cadre pour faciliter les flux de données mondiaux tout en garantissant la sécurité et la protection de la vie privée.

9. Comment combler la fracture numérique ? La fracture numérique nécessite des stratégies détaillées allant au-delà de la connectivité et impliquant des initiatives régionales, le déploiement de satellites LEO et des efforts en matière d’alphabétisation numérique. Les partenariats public-privé, en particulier avec les RIR, ont été soulignés comme étant essentiels pour favoriser la confiance et la collaboration.

10. Quel est l’impact des technologies numériques sur l’environnement ? Le FGI a étudié l’impact environnemental des technologies numériques, soulignant le fait que le secteur pourrait réduire ses émissions de 20 % d’ici à 2050. Des actions immédiates, des efforts de collaboration, des campagnes de sensibilisation et des politiques durables ont été préconisés pour minimiser l’empreinte environnementale de la numérisation.

Pour en savoir plus, consultez notre rapport final sur le FGI 2023.

À venir : eWeek 2023 de la CNUCED

Organisée par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) en collaboration avec les partenaires d’eTrade for all, l‘eWeek 2023 de la CNUCED est programmée du 4 au 8 décembre au prestigieux Centre international de conférences de Genève (CICG). Le thème central de cet événement novateur est : « Façonner l’avenir de l’économie numérique ».

Des ministres, des hauts fonctionnaires, des P.-D. G., des organisations internationales, des universitaires et des représentants de la société civile se réuniront pour répondre à des questions essentielles sur l’avenir de l’économie numérique : à quoi ressemble l’avenir que nous souhaitons pour l’économie numérique ? Que faut-il faire pour que cet avenir devienne réalité ? Comment les partenariats numériques et une coopération renforcée peuvent-ils contribuer à des résultats plus inclusifs et durables ?

Au cours de la semaine, les participants prendront part à plus de 150 sessions portant sur des thèmes tels que la gouvernance des plateformes, l’impact de l’IA sur l’économie numérique, les pratiques numériques respectueuses de l’environnement, l’autonomisation des femmes grâce à l’entrepreneuriat numérique et l’accélération de la préparation au numérique dans les pays en développement. 

L’événement explorera les domaines politiques clés pour construire une numérisation inclusive et durable à différents niveaux, en se concentrant sur l’innovation, les bonnes pratiques évolutives, les actions concrètes et les mesures réalisables.

Pour les jeunes de 15 à 24 ans, une consultation en ligne a été mise en place afin de s’assurer que leur voix soit entendue dans l’élaboration de l’avenir numérique pour tous.

Les comptes rendus de la GIP en temps réel et les sessions de Diplo à la CNUCED

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La GIP participera activement à l’eWeek 2023 en fournissant des rapports sur l’événement. Nos experts humains seront rejoints par DiploAI, qui générera les comptes rendus de toutes les sessions de l’eWeek. Mettez en favori notre page dédiée à l’eWeek 2023 sur le Digital Watch Observatory ou téléchargez l’application pour suivre les comptes rendus.
Diplo, l’organisation à l’origine de la GIP, co-organisera également une session intitulée « Scénario du futur avec les jeunes » avec la CNUCED et la Friedrich-Ebert-Stiftung (FES), et une session intitulée « Accords sur l’économie numérique et l’avenir de l’élaboration de règles commerciales numériques » avec CUTS International. La session de Diplo sera intitulée « Bottom-up AI and the Right to be Humanly Imperfect » (IA ascendante et droit à l’imperfection humaine). Pour plus de détails, visitez notre Diplo @ UNCTAD eWeek page.


Actualités de la Francophonie

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Les régulateurs des télécommunications francophones du Fratel se réunissent à Rabat pour renforcer les intérêts des utilisateurs

L’Agence Nationale de Réglementation des Télécommunications (ANRT) du Royaume du Maroc, présidente du Réseau francophone de la régulation des Télécommunications (Fratel) en 2023, a accueilli la 21e réunion annuelle du réseau, les 25 et 26 octobre 2023, à Rabat sur le thème : « Comment renforcer l’objectif de satisfaction des utilisateurs dans la régulation ? ». Plus de 140 participants représentant 18 autorités de régulation, membres de Fratel, des institutions internationales (Banque mondiale), des associations de consommateurs de différents pays, et des acteurs du secteur ont pris part à cette réunion.

Pour ses 20 ans, le Fratel a mis l’accent cette année sur la prise en compte des intérêts des utilisateurs. Après le 20e séminaire 2023 du réseau qui s’est déroulé en mai à Lausanne sur le thème « Pourquoi et comment associer l’utilisateur à la régulation ? », les tables rondes de la réunion annuelle ont permis aux intervenants d’évoquer les différents types d’utilisateurs au bénéfice desquels la régulation s’exerce et ce qui est mis en œuvre pour satisfaire leurs besoins voire les protéger. Il a aussi été question des moyens d’améliorer l’efficacité des actions d’information à l’égard de ces différentes catégories d’utilisateurs et de l’accompagnement du grand public face aux évolutions technologiques.

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Crédits photo : Fratel

Au cours de la réunion annuelle s’est déroulée l’élection du nouveau comité de coordination du réseau pour 2024. Il est composé de M. Marc SAKALA, Directeur général de l’ARPCE de la République du Congo (président), de Mme Laure DE LA RAUDIERE, Présidente de l’Arcep France et M. Az-El-Arabe HASSIBI, Directeur général de l’ANRT du Maroc (vice-présidents). 

Les membres ont vivement remercié Luc TAPELLA, Directeur de l’ILR du Luxembourg, pour avoir été membre du Comité de coordination durant les 3 dernières années.

Le plan d’action du réseau pour l’année 2024 a été adopté par ses membres. Les thématiques traitées en 2024 tourneront d’une part autour de l’avenir des réseaux et de la régulation et, d’autre part, sur les enjeux de régulation relatifs aux marchés de la donnée et des services numériques.

Le prochain séminaire aura lieu au cours du premier semestre 2024 au Togo et aura pour thème « Économie de la donnée et services numériques : quels enjeux de régulation technico-économiques ? ».  La réunion annuelle du réseau se tiendra au cours second semestre 2024 et portera sur « Quels modèles d’affaires et quelles stratégies des opérateurs télécoms dans le futur ? ».

En savoir plus : www.fratel.org

L’OIF poursuit sa mobilisation des représentants francophones à l’ICANN 

Après la Conférence ICANN77 à Washington en juin dernier, marquée par son retour dans cette enceinte, l’OIF a participé à la Réunion générale annuelle de l’ICANN (Société pour l’attribution des noms de domaine et des numéros sur Internet), à Hambourg, du 21 au 26 octobre 2023. Ce cadre a été l’occasion de poursuivre les efforts de mobilisation de la communauté francophone afin de renforcer la coordination et la mobilisation des voix francophones dans cette instance de régulation d’Internet. En effet, l’ICANN a pour principales missions d’administrer les ressources numériques d’Internet, telles que d’allouer l’espace des adresses de protocole Internet et de gérer le système des noms de domaines de premier niveau (TLD génériques et nationaux), et de coordonner les acteurs techniques. L’OIF y a un statut de membre observateur au sein du GAC (Comité consultatif gouvernemental), l’un des quatre comités consultatifs de l’ICANN qui représente la voix des gouvernements et des organisations intergouvernementales (OIG) dans cette structure multipartite.

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Crédits photo : OIF

A travers sa Direction de la Francophonie économique et numérique, l’OIF contribue à la coordination et mobilisation des acteurs francophones au sein du GAC afin de porter une voix et des priorités communes francophones de manière plus forte et avec davantage d’impact.

En marge des sessions, l’OIF a ainsi organisé une réunion de coordination des Représentants des Etats membres de la Francophonie au sein du Comité consultatif gouvernemental, le mardi 24 octobre 2023. Celle-ci a réuni 18 participants et a permis de faire émerger des priorités communes, notamment sur le système des noms de domaine (DNS) et la re-délégation aux autorités étatiques ou aux acteurs nationaux de la société civile d’Internet des domaines de premier niveau national (ccTLD, country code Top-Level Domain qui forment la dernière partie d’une adresse Internet et renvoient à un pays spécifique ou une région).  Les noms de domaine de premier niveau restent en effet une problématique récurrente pour certains Etats, notamment en Afrique francophone. Au-delà des questions techniques, cette re-délégation est une véritable question de souveraineté des acteurs nationaux sur leur nom de domaine national. Cet enjeu a été illustré par l’intervention du Ministre des Postes, des Télécommunications et de l’Économie numérique de la République de Guinée, Monsieur Ousmane Gaoual Diallo, qui, en introduction des sessions du GAC, a annoncé que son pays est enfin le gestionnaire du « .gn », après de nombreuses années de travail et de procédures (ce nom de domaine étant préalablement géré par des acteurs privés). 

Le partage de bonnes pratiques concernant cette re-délégation, la gestion et l’opérationnalisation du ccTLD, ainsi que la question du renforcement de capacités constituent des points d’attention et modalités d’intervention à privilégier afin de résoudre des situations similaires. 

Les prochaines réunions de l’ICANN auront lieu à San Juan, Puerto Rico, du 2 au 7 mars 2023 (Forum communautaire ICANN79) et surtout à Kigali, au Rwanda, pour le Forum politique ICANN80 du 10 au 13 juin 2024, qui sera une belle opportunité pour la communauté francophone de se mobiliser.

En savoir plus : www.francophonie.org

Evènements à venir : 

  • Colloque du Réseau francophone des régulateurs des médias (REFRAM) à Nouakchott (Mauritanie, 16-17 novembre 2023) : Organisé par la Haute Autorité de la presse et de l’audiovisuel de Mauritanie, ce colloque a pour thème « L’audiovisuel à l’ère numérique : acquis et défis ». 
  • Conférence eWeek 2023 (Genève, 4-8 décembre 2023) : l’OIF contribue au programme de cette manifestation internationale à travers 3 sessions avec pour thèmes « Vers un indice de vulnérabilité numérique », « Comment répondre aux besoins de compétences numériques en Afrique francophone ? » et « La découvrabilité des contenus numériques, un impératif pour garantir la diversité culturelle ».
  • Formation aux enjeux de négociation du Pacte numérique mondial (7-8 décembre 2023, en ligne) : Organisée par l’OIF en partenariat avec l’ISOC, cette formation s’adresse aux experts francophones en charge du numériques au sein des Missions permanentes des Nations unies à New York.